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CIRCULAIRE DE LA DACS N°CIV/07/10 DU 14/05/2010


Document très important à fournir pour toute demande de changement d'état civil. Il s'agit d'une circulaire du ministère de la Justice à destination des procureurs relative aux demandes de changement de sexe à l'état civil pour transsexualisme.

Circulaire de la DACS n° CIV/07/10 du 14 mai 2010 relative aux demandes de changement de sexe à l'état civil
NOR: JUSC1012994C

La ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés à:

Pour attribution
Monsieur le procureur général près la Cour de cassation
Mesdames et messieurs les procureurs généraux près les cours d'appel
et les procureurs près les tribunaux supérieurs d'appel

Pour information
Monsieur le premier président de la Cour de cassation
Mesdames et messieurs les premiers présidents des cours d'appel
et les présidents des tribunaux supérieurs d'appel

Textes sources:
Articles 9 et 57 du code civil, article 144 du code de procédure civile

L'attention du ministère de la justice et des libertés a été appelée à de nombreuses reprises sur les difficultés que peuvent rencontrer certaines personnes transsexuelles ou transgenres (c'est-à-dire n'ayant pas subi l'opération de mise en conformité de leurs organes génitaux avec le sexe revendiqué) pour obtenir le changement de leur sexe en marge de leurs actes de l'état civil.

En effet, le droit français se caractérise par l'absence de toute disposition législative ou réglementaire en la matière. Le système repose en son entier sur une construction jurisprudentielle fondée sur deux arrêts rendus le 11 décembre 1992 par l'assemblée plénière de la Cour de cassation, suite à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme le 25 mars 1992, aux termes desquels «lorsque, à la suite d'un traitement médico-chirurgical subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect dû à sa vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a l'apparence.».

La notion de traitement médico-chirurgical visée par cette décision a été entendue comme exigeant l'ablation des organes génitaux d'origine et leur remplacement par des organes génitaux artificiels du sexe revendiqué (opération de réassignation sexuelle).

Toutefois, certaines juridictions du fond considèrent que les exigences posées par la Cour de cassation visent essentiellement à démontrer le caractère irréversible du processus de changement de sexe. Ces juridictions admettent que celui-ci peut résulter des traitements hormonaux, dont la prise à long terme peut modifier de façon irréversible le métabolisme de la personne, ainsi que l'a d'ailleurs précisé le rapport de la Haute autorité de santé sur le transsexualisme (2009). Dès lors, des juges du fond ont fait droit à des demandes de changement de sexe présentées par des personnes n'ayant pas subi l'opération de réassignation sexuelle (notamment en cas de risques médicaux d'une telle opération) au vu des pièces fournies démontrant l'irréversibilité du processus, du fait d'une hormonothérapie et d'opérations de chirurgie plastique (prothèses mammaires, chirurgie esthétique du visage...).

Une telle évolution peut s'appuyer sur le fait que la jurisprudence de la Cour de cassation remonte à 18 ans et qu'il est légitime de prendre en considération l'évolution de la médecine et des traitements hormonaux suivis par les personnes transsexuelles, de telle sorte que le caractère irréversible du processus de changement de sexe pourrait résulter de traitements médico-chirurgicaux sans exiger pour autant l'ablation des organes génitaux.

Par ailleurs, il apparaît que la jurisprudence est fluctuante d'une juridiction à une autre s'agissant de l'exigence de recours à une expertise pour justifier de la réalité du transsexualisme, notamment en cas d'opérations chirurgicales réalisées à l'étranger. Alors que certains tribunaux ordonnent systématiquement une ou plusieurs expertises (médicales, endocrinologiques ou psychiatriques), d'autres tribunaux estiment suffisante la remise d'attestations de médecins reconnus pour leur compétence en la matière.

Cette diversité des pratiques peut être source d'incompréhension et perçue comme discriminatoire, puisque, selon le lieu où est déposée la requête, l'expertise sera ordonnée ou non, et ce d'autant que l'article 144 du code de procédure civile donne au juge le pouvoir souverain d'apprécier la nécessité de mesures d'instruction.

Outre le fait que le recours systématique aux expertises représente un coût, il a pour effet de rendre plus complexe et plus longue la procédure. Cette exigence s'avère aussi souvent inutile, en raison des nombreux rapports et documents médicaux devant être fournis par le requérant.

Au vu de ces éléments, vous pourrez donner un avis favorable à la demande de changement d'état civil dès lors que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des opérations de chirurgie plastique (prothèses ou ablation des glandes mammaires, chirurgie esthétique du visage...), ont entraîné un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l'ablation des organes génitaux.

Vous veillerez également à ne solliciter d'expertises que si les éléments fournis révèlent un doute sérieux sur la réalité du transsexualisme du demandeur. Dans tous les autres cas, vous fonderez votre avis sur les diverses pièces, notamment les attestations et comptes rendus médicaux fournis par le demandeur à l'appui de sa requête, qui engagent la responsabilité des praticiens les ayant établis.

Vous voudrez bien me faire part des éventuelles difficultés d'application de la présente circulaire.

Pour la ministre d'État, garde des sceaux,
ministre de la justice,
Le directeur des affaires civiles et du Sceau,
Laurent VALLEE

Sur le site du ministère de la Justice .
Télécharger le fichier PDF: CirculaireCIV.07.10 du 14 mai 2010.pdf, (2 pages, 104 ko).
Télécharger le fichier PDF: JUSC1012994C.pdf, (2 pages, 108 ko).

Mis en ligne le 20/08/2010.


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